La Tannière de l’Ork Bourré

Sweeney Todd, le barbier de Fleet Street et l’étrange histoire d’un collier de perles est un roman initialement publié avec succès en feuilleton vers la moitié du 19e siècle bien avant de devenir l’histoire que l’on pense connaître aujourd’hui.

Aussi hideux et inquiétant que puisse être le personnage original, le nom de Sweeney Todd ne laisse pas toujours indifférent depuis la version cinématographique de Tim Burton où il apparaît, certes, inquiétant mais également d’une sorte de charme étrange et envoûtant.

Après avoir croupi pendant quinze ans dans une prison australienne, Benjamin Barker s’évade et regagne Londres avec une seule idée en tête : se venger de l’infâme Juge Turpin qui le condamna pour lui ravir sa femme, Lucy, et son bébé, Johanna. Adoptant le nom de Sweeney Todd, il reprend possession de son échoppe de barbier, située au-dessus de la boulangerie de Mme Nellie Lovett. Celle-ci l’informe que Lucy se donna la mort après avoir été violée par Turpin.
Lorsque son flamboyant rival Pirelli menace de le démasquer, Sweeney est contraint de l’égorger. L’astucieuse Mme Lovett vole à son secours : pour le débarrasser de l’encombrant cadavre, elle lui propose d’en faire de la chair à pâté, ce qui relancera du même coup ses propres affaires.
Sweeney découvre que Turpin a maintenant des visées sur Johanna, qu’il séquestre avec la complicité de son âme damnée, le Bailli Bamford. L’adolescente a attiré les regards d’un jeune marin, Anthony, celui-là même qui avait sauvé Sweeney lors de son évasion. Amoureux fou de la jeune innocente, Anthony se promet de l’épouser après l’avoir arrachée à Turpin.
Pendant ce temps, le quartier de Fleet Street s’est entiché des “tartes” très spéciales de Mme Lovett, et celle-ci se prend à rêver d’une nouvelle vie, respectable et bourgeoise, avec Sweeney pour époux et Toby, l’ancien assistant de Pirelli, comme fils adoptif. Mais Sweeney est bien décidé à mener à terme sa vengeance, quel qu’en soit le coût… (Allociné)

Si dans cette version, Todd est le pseudonyme d’un exilé cherchant une juste vengeance, l’histoire originelle est totalement différente, notre barbier n’étant rien d’autre qu’un vil tueur psychopathe bien avant que le terme ne naisse dans le jargon policier ou littéraire.

” C’était un homme grand, au physique ingrat, comme un pantin dont les parties auraient été mal assemblées, doté d’une bouche, de mains et de pieds si immenses qu’il était lui-même, d’une certaine manière, une véritable curiosité de la nature. ”

Lorsque l on apprend la disparition d un jeune marin dans la capitale anglaise, tous ses amis se mettent à sa recherche. Les pistes semblent toutes mener près du salon d un barbier, aux abords de Fleet Street. Sweeney Todd a encore frappé...

Découvrez l une des principales sources du Dracula de Bram Stoker, vivez le récit original du légendaire tueur en série de Londres et laissez-vous transporter au coeur d une cité londonienne fourmillante d horreurs et d épouvante en dégustant les fameuses tourtes de Mrs Lovett.

En France, nous ne connaissions qu une partie de ce personnage et de son histoire, nous vous livrons à présent l intégralité du roman dans lequel Sweeney Todd, le barbier légendaire, l un des héros les plus singuliers de la littérature, vécut sa première aventure. (Editions Callidor)

Tel est le vrai visage du monstre, tel qu’il fut imaginé par Rymer, bien plus proche de Jack l’Eventreur que de Jack Sparrow. Sweeney ne cherche aucune vengeance mais uniquement la fortune et, si possible, de façon aussi rapide que malhonnête. C’est ainsi qu’il a pris l’habitude détrousser les voyageurs isolés faisant l’erreur de s’arrêter dans son échoppe en y présentant de quelconques signes de richesses.

Point commun avec le film ?

Todd fait disparaître ses victimes en faisant basculer son fauteuil dans une cave de plusieurs mètres de profondeur, en prétextant devoir aller chercher un quelconque objet dans l’arrière-boutique où se trouve le mécanisme du fauteuil. En bas, il n’a plus qu’à achever les malheureux déjà bien mal en point après leur chute et les dépouiller de tout ce qu’il possède, jusqu’aux vêtements, chaussures et éventuels bagages.

Le barbier héberge un jeune apprenti du nom de Tobias (et non Toby, l’apprenti d’un rival) qu’il terrorise et fait chanter en contrefaisant complètement le mensonge qu’il partage avec la mère de celui-ci. Fourbe au plus haut point, il trouve toujours une excuse pour envoyer le jeune garçon faire une course éloignée lorsqu’il choisit sa future victime et lui interdit également l’accès à l’arrière-boutique d’où son logement est accessible.

Et Mme Lovett, dans tout ça ?

Si, au début du roman, Todd joue l’indifférence à son sujet, il apparaît rapidement que les deux filous sont liés en affaires avec le but avoué de s’entraider à faire fortune. Todd fournit une viande goûteuse et gratuite et Lovett la prépare et la vend. Pour cela, si le barbier préfère travailler seul, elle a choisi de séquestrer des malheureux dans sa cave afin de les obliger à cuisiner pour elle. Et quand ces derniers se rebellent, elle leur envoie Todd pendant leur sommeil et le cycle se poursuit avec un autre vagabond.

Alors que vient faire ce collier de perles dans l’histoire ?

Le collier est le présent d’un jeune marin parti faire fortune et perdu en mer à sa future épouse laissée derrière lui à son départ pour les Indes. Si le marin n’est pas Anthony, la belle est Johanna, la fille du fabricant de lunettes, bien décidée à découvrir si son amant, Mark Ingestrie, a réellement péri en mer ou ne serait pas, par hasard, l’homme porté disparu en emportant le collier avec lui du coté du salon d’un certain barbier… ?

On le comprend aisément, bien qu’il semble revêtir une importance capitale, ce collier est le prétexte qui permet de rassembler l’ensemble des personnages autour d’une même histoire : le vol du collier, les tentatives pour le revendre, les malheurs de Tobias, l’apprenti de Todd, les inquiétudes de Johanna, les enquêtes du Colonel Jeffery pour retrouver le collier ou l’homme qui le portait, Mr Thornhill, son meilleur ami.

Et ce que l’on peut dire, c’est que la chimie opère et que le mélange fonctionne. Bien qu’ancien, le texte se laisse lire sans peser ni sembler incohérent ou invraisemblable et reste une oeuvre remarquable.